HISTOIRE DE DEUX HEROS DE GUERRE.
Avec mes remerciements les plus chaleureux à Larissa Issaeva pour m'avoir fait découvrir cette bouleversante histoire, et avoir traduit gracieusement le document original en russe.
C'est la petite fille qui a raconté cette histoire, à partir de ce que lui avait dit sa grand - mère.

LE BLOCUS DE LENINGRAD. Environ 900 jours, de septembre 1941 à janvier 1943. Un million de morts, dont à peu près 800 000 de faim.
DEUX FEMMES : une mère et sa fille (grand - mère et mère de la narratrice). ET LE CHAT ROUX, Vasjka. Il est encore vivant, alors que la plupart des animaux ont été dévorés par les habitants affamés. Chaque jour, le rouquin part chasser. Il tue des animaux (souris, et parfois un gros rat) qu'il ne consomme pas, mais ramène à la maison. La mère éviscère les souris et fait de la soupe avec. Avec le rat, elle prépare un bon goulache. Le chat reste sagement à côté de la cuisinière et attend patiemment le moment du repas, qui sera partagé équitablement entre les trois présents. Plus tard, la mère expliquera que sans ce compagnon providentiel, ni elle ni sa fille n'auraient survécu à la famine.
La nuit, les trois dorment sous la même couverture, chacun(e) dispensant sa chaleur aux deux autres.
Vasjka avait la capacité de pressentir les bombardements bien avant que l'alerte aérienne ne soit lancée : il commençait à tourner sur lui - même et à miauler très fort. La mère avait alors juste le temps de préparer quelques affaires, de l'eau, et les deux femmes couraient vers l'abri en emmenant le chat avec elles. Une fois là bas, elles lui accordaient une attention toute particulière, de façon à ce que personne ne le vole pour le manger.
CHASSE COORDONNEE. Comme les humains, le chat était affamé, très maigre et s'affaiblissait. La mère, maîtresse héroïque et géniale, permettait aux oiseaux de survivre à l'hiver avec les quelques miettes de pain qu'elle avait pu récupérer, et dans le même temps, faisait d'eux des proies potentielles plus faciles. Au printemps, elle partait à la chasse avec le chat. Elle jetait des miettes et se plaçait en embuscade avec lui. Quand les oiseaux venaient picorer. le chat, rapide et précis, en saisissait un, mais sa faiblesse l'empêchant de retenir sa proie, sa maîtresse intervenait pour "finir le travail". Ainsi, entre printemps et automne, la famille pouvait ajouter des oiseaux à son menu...
Après la fin du blocus, la mère réservera les meilleurs morceaux à Vasjka, le caressant tendrement en lui disant : "tu es notre sauveur et notre nourricier".
LA FAMILLE RESTE UNIE. Vasjka est mort en 1949. La mère l'a enterré au cimetière et, pour empêcher que sa tombe ne soit piétinée, elle y a placé une petite croix avec le nom : "Vassilij Bougrov". Quand celle -ci est décédée, sa fille l'enterra à côté de lui. Et quand la fille décéda à son tour, la petite fille enterra sa mère avec sa grand - mère et le chat, de façon à ce qu'ils soient à nouveau réunis, comme lorsqu'ils partageaient la même couverture pendant les nuits du blocus de Leningrad.
HEROS DE LA NATION. Vasjka a reçu, à titre posthume, le titre de Héros de l'Union Soviétique (Герой Советского Союза, Gueroï Sovietskogo Soïouza), qui est le plus haut titre honorifique et le degré suprême de distinction qui puisse être accordé à quelqu'un en URSS. Une épitaphe sur la pierre tombale immortalise son statut.
