NO MORE COUNTRY FOR OLD MEN
Dimitri est mort le 11 janvier dernier. Je n'ai appris sa mort qu'hier. Grâce à lui (et quelques autres : Nicolas Baïkov, Lev Kaplanov, Valentin Raspoutine...), je suis encore vivant.
La lecture des aventures des loirs Goutatou et Dorochaux (qu'il signait de son vrai nom : Guy Mounimoux), dans le magazine Pilote, ont illuminé certains étés de mon enfance, qui l'étaient déjà beaucoup. Voir les deux compères se partager une poire était délectable.
Quelques années plus tard, la découverte de la série "Le Goulag" m'a évité de mourir d'ennui et de désespoir à l'Ecole Normale d'instituteurs ou le Récit était officiellement frappé d'ostracisme . La trogne d'Eugène Krampon m'a rappelé un certain coup de crayon, et j'ai alors compris que Dimitri et Mounimoux n'étaient qu'une seule personne. Atmosphère onirique, situations truculentes, impressionnante hardiesse vestimentaire de Loubianka, la pulpeuse commissaire du KGB... A la même époque, la "Partie de Chasse" d'Enki Bilal fut la cerise sur le gâteau qui paracheva ma survie.
Plus récemment, j'ai lu "Le Voyage" où Pythéas le massaliote croise un rhinocéros laineux "domestique" dans une contrée littorale dont on ne sait trop si elle correspond à la Bretagne, l'Ecosse ou l'Irlande, puis entame un dialogue avec un cachalot... Et "Haute Mer", odyssée polaire stupéfiante, manifestement inspirée du "Jean-Marie Cabidoulin" de Jules Verne.
https://europe-tigre.over-blog.com/2021/06/legende-des-siecles.html
Comme chez Pythéas, les découvertes les plus secrètes resteront enfouies à tout jamais. A l'issue de l'aventure, le capitaine baleinier* se mure dans le silence...
Poète et conteur hors de pair, Soldat oublié**, Dimitri était courageux, intelligent et plein d'humour, mixture personnelle si rare aujourd'hui. Il porte la corne remplie de braises, comme le fantôme du Père d' Ed Tom Bell, dans "No country for Old Men"... ADIEU, ET MERCI.
* Celui-ci tient sa pipe au bec à l'envers, pour s'empêcher de fumer. Comme le fera plus tard Willem Dafoe dans "The Light House"...
**Le Soldat oublié. Robert Laffont. 1967.
