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18 mars 2009 3 18 /03 /mars /2009 09:28
EFFONDREMENT INDIEN, EVEIL EUROPEEN

Tigres indiens: la course à la mort

Le scepticisme qui avait marqué l'annonce, à la fin 2007 et au cours des premiers mois de 2008,  par le gouvernement indien, de mesures vigoureuses pour sauver les tigres sauvages sur son territoire s'avère malheureusement pertinent. La philosophie générale qui en émanait était de toute façon contestable (séparer radicalement les animaux sauvages des communautés humaines). Les choix des modalités d'application s'avèrent, en outre, souvent incohérents et parfois carrément absurdes. Le braconnage redouble d'intensité (le malheur des tigres étant aussi celui des léopards, gavials, rhinocéros, lions...). Toutes infos accessibles sur le site de Nirmal Gosh: Indian jungles.com.
De ce point de vue, l'article d'Armand Farraci "L'Inde sans tigres?", publié en 2007, était dramatiquement prémonitoire (à lire ou relire sur le blog de Martine Massot - Tigrissima -).

Europe: réouverture d'un "cold case"
Dans le même temps, la communauté scientifique se penche à nouveau sur le cas du tigre eurasien, et, cette fois - ci, dans un nouvel état d'esprit. Depuis la mise en ligne, le 14 Janvier dernier,  d'une étude de l'équipe du Conservation Research Unit de l'Université d'Oxford montrant que cet animal et le tigre de Sibérie ne représentent en fait qu'une seule lignée génétique, sa réintroduction dans des zones de son aire de distribution historique est, pour la première fois, en projet. Le Directeur du Département concerné, David Mc Donald, qui a directement participé aux recherches, est particulièrement enthousiaste, percevant l'importance d'une telle initiative pour l'avenir (lire dans Daily Science mis en ligne le 2 février). Le dr Ali Aghili, de la  Persian Leopard Conservation Society, a commencé à évaluer la faisabilité d'un tel projet dans une zone du nord - est de l'Iran.
Une telle étude pourrait même redonner sa chance, aussi, au tigre de Chine du Sud, comme l'a expliqué l'un des membres de l'équipe, Noggy Yamaguchi. Celui ci est un ami de la courageuse Li Quan, qui réalise depuis 2003 une implantation réussie de ces animaux en Afrique du Sud (voir son site "Save China's tigers.org").

De plus, aujourd'hui, en mer d'Aral, patrie des derniers tigres d'Asie centrale avant leur extinction, des agronomes ouzbeks, constatant l'impossibilité de remettre en eau la plus grande partie de ce qui fut jusqu'en 1960 la quatrième plus grande étendue d'eau salée intérieure du monde, et la salinisation consécutive, chaque année, de superficies considérables, ont opté pour le boisement des fonds asséchés par de robustes arbustes locaux tels que le saxaoul, le kandym et le tcherkez, dont les bosquets constituaient autrefois un paradis pour les tigres et les sangliers notamment. Dès 2007, au Kazakhstan voisin, 15 millions de pieds de Saxaoul avaient déjà été plantés... (Pavel Kravets dans Ferghana.ru - Moscou - à lire dans Courrier International 958,12 - 18 mars 2009, page 53).

Force et discrétion
Comme celà a pu se vérifier bien des fois par le passé, l'offre de conditions minimales de réinstallation seront suffisantes pour assurer le succès de l'opération, puis sa pérennité si celles - ci sont durablement maintenues. Rappelons simplement que l'arrivée actuelle de loups dans le Massif Central a pu s'effectuer par la traversée du Rhône. Or, la vallée de celui - ci est pour le moins inhostitâlière pour un animal sauvage, avec ses autoroutes, ses lignes de chemin de fer, sa forte densité de population,la largeur du fleuve lui - même, sans parler du trop célèbre "couloir chimique".Or, comme l'explique Daniel Véjux, spécialiste de l'animal,un loup peut parcourir 60 kilornètres en une nuit. Il peut traverser un fleuve à la nage et circuler dans les zones urbaines sans se faire remarquer ou passer pour un chien.
De même, au 19ème siècle (fait relaté par Atkinson en 1858), des tigres fuyant une terrible sécheresse qui s'était abattue sur la steppe kirghize, leur lieu de vie habituel, traversèrent l'Irtych pour rejoindre les Monts Altaï. 5 d'entre eux (c'est - à - dire probablement tous), finirent par être abattus. Les paysans de Sibérie occidentale restèrent circonspects devant cette bête inconnue si étonnante à tous égards. Quand le naturaliste leur dit comment elle s'appelait, il s'avéra qu'ils ignoraient même son nom. L'analyse stomacale montra que le bol alimentaire était exclusivement constitué d'une grande quantité de criquets et de graines sèches...



Convergences et synergies
En excluant les tigres de Sibérie, les tigres présents historiquement du bassin du Danube au Turkestan Chinois  (on en catégorisa jusqu'à 3 sous - espèces distinctes et une variété géographique) ne constituent qu'une seule lignée génétique. De même, les cultures de l'Europe à l'Inde du Nord ont les mêmes racines (Alexandre, Gengis Khan, Timur furent des eurasiens dans le plein sens culturel du terme). On sait aujourd'hui que ces racines sont pastorales, bien plus que sédentaires et horticoles. La domestication du cheval a été en effet l'un des évènements les plus déterminants de l'Eurasie protohistorique pour son histoire ultérieure. Selon une équipe internationale de chercheurs menée par l'archéozoologue Alan Outram (de l'Université anglaise d'Exeter), l'exploitation de cet animal remonte au moins au IVème millénaire avant notre ère à la fois dans le nord du Kazakhstan et sur le territoire actuel de l'Ukraine. Ceci a aussi déterminé l'acquisition de lactase permettant la digestion du lait chez les adultes dans les populations concernées. Or, si de nombreuses communautés asiatiques en sont dépourvues, elle est majoritairement présente en Europe du Nord, et à parité en Europe du Sud ( publié dans "Science" du 6 mars).
Par ailleurs, les deux cités dont l'influence sur l'Eurasie a été historiquement la plus forte, Rome et Samarkand, sont fondées à la même époque (700 avant notre ère). Les légendes liées à leurs naissances respectives évoquent le lien fondamental avec un grand prédateur. Si  Rome est fondée par deux jumeaux élevés par une louve, Samarkand voit le jour grâce à un léopard femelle venu de Pendjikent (actuel Tadjikistan) qui indique le lieu adéquat aux futurs fondateurs de la ville.



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