REVIVISCENCE PROSPECTIVE : L' EUROSIBERIE
Cet article est une actualisation et un complément à ceux déjà consacrés sur ce blog à la culture
européenne du tigre comme élément clé de la survie puis du réépanouissement humain du continent. Les plus importants à cet égard furent :
1. "Europe : le tigre ou la mort" du 14 juillet 2011 (repris et illustré le 19 juillet 2011 dans
"Nature Sauvage et Civilisation", le blog de Stéphane Carbonnaux, il fut à la base d'une interview accordée au magazine "Elements pour une civilisation européenne" 141 (automne 2011), pages 42 -
43).
2. "Epopée de la lumière" du 4 décembre 2011 (repris et illustré dans "Nature Sauvage et
Civilisation" du 5 mars 2012).
Voir aussi "L'Alternative" du 29 Décembre 2011, "Retrouver un temps printanier" du 21 mars 2012, "Oeufs d'or" du 26 Avril
2012.
LA GRECE A LA CROISEE DE SES PROPRES CHEMINS
Dans cinq jours, les élections législatives en Grèce donneront peut être, si le parti Syritza l'emporte et se trouve en mesure de gouverner, une coloration nouvelle à la "crise" européenne. Ce
parti souhaite, en effet, un rapprochement avec la Russie, pays sans dette et à fort excédent, héritier de la culture byzantine. Cette perspective affole les zombies du finistère extrême
occidental, alors qu'il relève de la simple logique économique, culturelle et historique. Les deux prénoms les plus fréquents en Russie ne sont pas slaves, mais scandinave (Vladimir) et grec
(Alexandre), révélateurs du niveau d'influence des civilisations viking et byzantine sur le pays à partir du 10ème siècle. Par ailleurs, si la Grèce de l'antiquité a bien été une des matrices
majeures de la pensée occidentale, son histoire et sa géographie furent afro - eurasienne pendant l'Antiquité (comptoirs de la mer Noire et civilisation gréco - slave, puis présence en Asie
centrale et civilisation gréco - bactrienne à partir du règne d'Alexandre, et civilisation gréco - égyptienne à travers ses successeurs de la dynastie Ptolémaïque), moyen - orientale
pendant 13 siècles (empires byzantin puis ottoman), enfin plus strictement balkanique (depuis la deuxième moitié du 19ème siècle),
Peut être la Grèce va t-elle à nouveau, comme le fit Dionysos à cheval sur un tigre, traverser le pont de pampre et de lierre ... (voir "Une si récente présence" du 30 mai).
Une présence à venir aussi, celle du furieux Zagreus épidémique...
ARIDITES
De fait, Europe occidentale, Grèce et Russie sont respectivement et avant tout , malades d'elles mêmes. Elles subissent de plein fouet une crise énorme de représentation et d'identité,
fruit du vide abyssal issu de la progression exponentielle du mode de vie sédentaire au détriment d'autres rapports à l'environnement. Ce phénomène sécrète une peur de l'altérité en général, qui
s'exprime à travers une volonté de contrôle obsessionnel du corps social et de son environnement naturel (voir à cet égard le très éclairant, et sans doute indépassable - livre de François
Terrasson "La peur de la Nature").
Le fond de l'affaire, c'est le mépris et la haine de soi. Nous avons renoncé à la Liberté, la Vie Sauvage, un comportement Adulte, et donc à toute
la gamme de savoir faire et savoir être qui y sont associés, pour la sécurité et le confort supposés d'une vie domestique scandée par une infantilisation proliférante. Et notre
nullité, insignifiance, inconsistance, incompétence nous dégoutent.
Le syndrôme obsidional qui gouverne notre Psyche commune est une des manifestations les plus crues de cette impuissance sénile.
J'avais souligné l'impérieuse nécessité, pour une culture vivante et fonctionnelle, d'un équilibre et d'une complémentarité entre modes de vie
urbain, sédentaire horticole, pasteur nomade, chasseur cueilleur, semi aquatique et marin, etc..., dans mon essai écohistorique "Europe et grands félins" à l'automne 2008 (format PDF
téléchargeable à partir de la page d'accueil de mon site "4 continents pour les tigres"). Ceci resta peu ou prou opérationnel jusqu'au 18ème siècle en Europe occidentale. Le collapsus coïncide
évidemment avec la Révolution industrielle (qui commence en Angleterre dans les années 1720) elle - même issue d'un changement de représentation qui fait la part belle à une pensée plus
qu'asservissante : réificatrice). Il avait été précédé, deux siècles auparavant, par une victoire politique des sédentaires sur les nomades en Eurasie. Il reste aujourd'hui encore quelques traces
de cette complémentarité sur le territoire de l'actuelle Russie et en Asie centrale.
FLUX AETERNA
La "crise" ne prendra fin que lorsque la
continuité du flux socio - politique sera rétabli (re ligare). Lorsque nous ressentirons clairement à quel point renouer avec le Sauvage est libérateur. Le désharnachement des fleuves
induit le décorsetage de l'Âme.
Le FLUX, c'est la PUISSANCE (DERJAVA en
russe, TAURUS en latin, VIÂGRÂÂ en sanskrit - qui veut dire "LE TIGRE" - ).
"POSER SUR LE MONDE UN REGARD SANS HAINE" (Princesse Mononoke, film d'animation de Hayao Miyazaki,
1997)
Pour retrouver trace du jeu des eaux vives du passé, les îlots de limon fertile d'une Europe libre, élusive et
ubiquiste, graines à partir desquelles l'Avenir peut à nouveau prendre forme et s'épanouir, j'ai choisi quatre refuges successifs des tigres et léopards européens autant que de modes de vie
alternatifs aux métastases sédentaristes (Espace Nord - Sud Polésie / Crimée du Moyen Âge, Carpathes orientales d'une part et Russie méridionale entre Don et Volga d'autre part jusqu'au 17ème
siècle, Sibérie jusqu'à aujourd'hui - espace désormais réduit à l'extrême Orient russe, qui fut transbalkaïque jusqu'au 20 ème siècle, et même transvolgaïque jusqu'au 18ème
siècle).
Nous allons aussi montrer l'influence politique et sociale actuelle de ces ilôts et leur puissance catalytique
pour l'Avenir politique et culturel d'un Continent en mal d'identité propre.
DE LA POLESIE A LA
CRIMEE
J'ai montré à quel point la Polésie a été capitale
dans l'Histoire de l'Europe (voir "Europe coeur battant" du 12 Avril 2010, et lire : Marie Pierre Rey. Flammarion 2012. L'effroyable tragédie. Une nouvelle histoire de la campagne de Russie (qui
illustre, parmi beaucoup d'autres éléments, le rôle décisif des chevaux des steppes dans une victoire russe qui va réorienter l'Histoire européenne moderne)). Une partie de la région est dans une
situation paradoxale de retour à l'état sauvage et de la montée en puissance progressive d'une profusion floro - faunistique dans un milieu fortement contaminé par les radionucléides après
l'accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1986.
A lire : T.A. Khvagina. 2005. Polesye. From the
Bug to the Ubort. Minsk. Vysheysha shkola.
Le nom de cette immense zone de marais
vient du slave "Pod - lese" qui signifie : "Sous la forêt".
C'est au Nord de cette région, "les marais de
Pinsk" - la ville actuelle a comme armoiries un arc scythe -, où Vladimir Monomaque doit affronter un tigre à la fin du 11ème siècle, alors qu'il capture des chevaux sauvages dans les marais qui
sont aussi les proies du félin (voir pages des 16 et 19 août 2009), lors d'une des chasses qu'il effectue entre Turov (actuelle Turaü en Biélorussie, dont les armoiries sont un archer scythe), et
Tchernigov (actuelle Tchernihiv en Ukraine).
Les marais de Polésie. Huile sur toile
de 1896
Turov et Tchernigov sont en lutte contre le pouvoir
kiévien. Après la mort de Mistlav, fils de Vladimir Monomaque, la Rus kievienne s'auto - détruit, implosant en une myriade d'apanages hostiles. Kiev est détruite en 1168 par le Prince
de Vladimir Souzdal Andreï Bogoloubsky (d'ascendance nomade) et ne s'en relèvera pas.
La Russie actuelle, qui le revendique pourtant
ostensiblement, s'est en réalité formée à partir de la Moscovie, principauté privilégiée par les Mongols lors des dernières décennies de l'occupation de la Russie par ceux ci, et qui finit par se
retourner contre eux, quand, affaiblis par leurs conflits internes, ils ne purent s'opposer durablement à la créature qu'ils avaient nourrie et
armée.
Jusqu'au 13ème siècle et l'intervention d'Alexandre
Iaroslavitch Nevsky soutenu par les Mongols, Novgorod constituait le "comptoir" le plus oriental de la ligue Hanséatique (comme l'a montré Jean pierre Arrignon dans son livre "La Russie
médiévale" paru en 2003).
L'Ukraine est également candidate à l'héritage, et
ce plus logiquement eu égard aux aspects historiques et géographiques. De plus, Ukraine et Pologne furent étroitement liées entre 15ème et 17ème siècles : l'une des principautés importantes
de la Rus "kiévienne" au 13 ème siècle était celle de Galicie - Volhynie, l'influence de l'Empire polono - lituanien aux 15ème et 16ème siècles fut déterminante, les Cosaques furent d'abord
au service de la Pologne avant d'être au service de la Russie à partir de la deuxième moitié du 17ème siècle.
Un tsar polonais fut installé sur le trône de
Russie en 1610, pendant "Le temps des troubles" à l'issue duquel (1612) fut véritablement fondée la Russie moderne.
Tout ceci relève, de fait, d'un conflit civil entre
slaves qui peut (et doit) être dépassé, et n'a pas grand chose à voir avec des différences essentielles de culture.
Toutefois, la culture cosaque n'est pas (du tout)
de nature sédentaire ni domestique. Elle est l'héritière directe, en Europe, de la culture scythe, de sa façon
d'ëtre et
de son savoir faire. Or, c'est sur cette communauté que se sont appuyés russes et polonais pour régler leurs conflits géopolitiques, ainsi que ceux avec la Perse et l'Empire ottoman,
notamment.
Comme l'a magnifiquement montré Iaroslav Lebedynsky
("Les Cosaques. Une société guerrière entre libertés et pouvoirs. Ukraine. 1490 - 1790." Editions Errance - Collection "Civilisations et cultures" 2004), il s'agit d'une société d'hommes libres,
guerrière et démocratique, fondatrice de la culture ukrainienne. Leur Etat se situe sur un vaste ilôt au milieu du Dniepr, "la Sitch". Représentant la seule démocratie véritable en Europe à
cette époque, ces hommes vont porter plus haut que nul autre l'étendard de la Liberté. Pas "les libertés" d'Europe occidentale, qui sont un simple octroi du Pouvoir, et peuvent être retirées à la
moindre fluctuation historique sans que quiconque ait le cran de s'y opposer réellement. La VRAIE LIBERTE.
Leur rôle sera décisif dans l'Histoire de l'Eurasie
moderne, de la conquête de la Sibérie à partir du 16ème siècle à la victoire sur Napoléon dans la Guerre de 1812. Leur influence se fait sentir aujourd'hui, sur un plan essentiellement symbolique
(mais pas sans importance) en Ukraine et sur un plan très concret en Sibérie. Nous allons y revenir plus bas par le détail.
XXème SIECLE : TENTATIVE D'ERADICATION DE LA
CULTURE NOMADE ET DE SON ESPRIT DE LIBERTE : "HOLODOMOR".
L'idéologie sédentariste et réificatrice utilise
son bras armé industriel à pleine puissance au siècle dernier (nous pensons spontanément à la destruction des Juifs d'Europe,
"Shoah").
"Holodomor", "l'extermination par la faim", évoque,
chez les ukrainiens, la famine artificielle provoquée par Staline et ses sbires pour briser la communauté et détruire sa culture, et qui provoqua la mort de plusieurs millions de personnes dans
des conditions atroces (lire par exemple : Georges Sokoloff : 1933. L'année noire. Témoignages sur la famine en Ukraine. Edition française. Albin Michel. 2000. (Edition originale : 33-I :
HOLOD. NARODNA KNYHA - MEMORIAL, Lidia Kovalenko & Volodymyr Maniak. Edité par Anton Maniak). La mortalité (à partir d'une base de 100/1000 en
temps "normal"), monte à 183/1000 sur l'ensemble de la Russie, et à 367/1000 en Ukraine. Les communautés cosaques de Russie (Kouban, Don, Basse et Moyenne Volga, notamment la région de Stavropol)
sont affectées dans des proportions encore supérieures. Mais les plus touchés sont les communautés nomades traditionnelles de l'Asie centrale soviétique :
leur cheptel est entièrement détruit avant qu'on les fournisse en tracteurs qui ne marchent pas. Entre 1929 et 1931, un tiers de la population du Kazakhstan
disparaît.
La destruction directe des tigres d'Asie centrale
(ex tigres européens), puis de leur milieu (roselières et forêts alluviales) sont soit le prélude soit le complément en simultanéité à la destruction de la culture nomade et de son esprit de
liberté (lire à ce sujet : Johnson P. 1991. The Birth of the Modern World Society 1815 - 1830. Harper Collins Publishers.)
HOLODOMOR :
PROLEGOMENES.
Tichmenjev : combat près de
Barnaul (Altaï, Sibérie occidentale). Huile sur toile.
DANS L'UKRAINE D'AUJOURD'HUI, SOCIETE STRICTEMENT
SEDENTAIRE A SYSTEME POLITIQUE OPPRESSIF : une illustration de la survivance des principes anciens, à travers les référents symboliques de l'opposante Yulia
Timoschenko.
Après des débuts en belle brune moderne et libérée,
Yulia Timoshenko a adopté la blondeur et la tresse de la femme traditionnelle ukrainienne, qui est aussi celle de la Berehynia, l'ondine (ou naïade) protectrice des berges et des marais, divinité
féminine de la Russie kiévienne préchrétienne, à partir de 2004 et de la Révolution Orange, dont elle devient l'égérie aux côtés de Vladimir Ioutshenko, homme politique issue d'une famille
cosaque. L'ondine divine est elle même un avatar de la grande élane astrale matricielle et lactescente, qui se déplace dans le firmament aux côtés de son faon, en qui les populations d'Europe
occidentale voient plutôt, depuis la Préhistoire, une Grande Ourse et sa fille...
Comme on peut le voir dans "Naissances :
Renaissance", page publiée sur ce blog le 30 mai dernier, Mme Timoschenko a adopté comme mascotte et emblême une tigresse blanche. A l'époque de la Kiev préchrétienne, la divinité protectrice de
la cité de Tchernigov, opposée à Kiev, était accompagnée d'un tigre...
LES CARPATHES ORIENTALES
Elles furent probablement l'ultime refuge occidental des léopards et tigres européens, entre les 13ème et 18ème siècles, après leur éradication en Polésie ukrainienne et
polonaise (voir notamment le document PDF "Europe et grands félins" déjà cité). "La carpathe boisée" (Bukovine du Nord) se situe à l'ouest de l'actuelle Ukraine. Elle correspond à une partie de
la Galicie - Volhynie de l'époque kiévienne. La Bukovine du Sud, située en Transylvanie roumaine, est très comparable quant à la structure et les activités des communautés qui la peuplent à
sa voisine septentrionale - petits éleveurs de montagne -, seule la langue varie. Elle correspond à la Marmatie de l'époque
kiévienne.
La nouvelle "Le signe des ancêtres" publiée en 1913, a pour cadre cette région, et se déroule au sein de la communauté Houtsoule. Elle est, structurellement, une véritable
Tragédie Grecque. De celle - ci sera tiré, en 1964, le célèbre film de Sergeï Paradjanov "Les chevaux de feu". Celui - ci est découpé en douze "chapitres" dont chacun correspond à un mois. Le
premier est intitulé "Les Carpates, oubliées de Dieu et des hommes, terre des Houtsoules".
Les voïvodies de Galicie - Volhynie et de Marmatie furent vidées de leurs habitants par les envahisseurs mongols à partir de 1223, et ne se reconstituèrent démographiquement
que 5 siècles plus tard. Entre temps, la plupart des villages de montagne restèrent abandonnés. Les voyageurs et cartographes évoquaient les "loca deserta", "terra sine incolis" ("terre
inhabitée") et même "Regnum Arctorum" ("le Royaume des Ours").
La Bukovine fut, pendant ces 5 siècles, beaucoup plus vide d'hommes que la très montagneuse Svanétie géorgienne (Caucase du Sud), riche en tigres et léopards jusqu'au début du siècle dernier...
ENTRE DON "PAISIBLE" ET "MERE VOLGA".
L'âge d'or des Cosaques, léopards et tigres en Russie centrale.
La prévalence du mode
de vie et de la culture cosaque entre Azov et Caspienne entre 15ème et 18ème siècle assure le maintien d'un milieu favorable aux tigres et léopards. Si les interactions meurtrières avec les
hommes libres, la plupart du temps à l'initiative de ces derniers, sont assez fréquentes, elles ne fragilisent pas leurs populations, l'écosystème étant maintenu dans sa puissance fonctionnelle
globale. Les Cosaques, comme sur le Dniepr, se livrent dans ses régions, sur leurs stougs (barques monoxyles) à la pêche à l'esturgeon géant au harpon, qui s'apparente, face à certains individus
immenses (voir le Musée zoologique de Leonid Kouriakine à Rybinsk) à la chasse à la baleine franche... Ils sont aussi pirates sur la Basse
Volga...
LA SIBERIE, C'EST
L'AMERIQUE.
Mandaté par des marchands de Novgorod, le cosaque Hyermak, fils d'un célèbre pirate de la Volga, se lance dans une odyssée sibérienne "transvolgaïque" via l'Asie centrale
(dans les steppes de laquelle il mentionne des créatures qui étaient peut être des descendants relictuels des rhinocéros à fourrure) jusqu'à la mésopotamie entre Irtych et Ob. C'est la terre des Khantys et des Mansis (à lire : "La chatte qui a sauvé le monde" par Roman Rouguine, Eds Paulsen 2008 pour la
version française). La conquête, trois siècles plus tard, atteindra le Pacifique (deuxième moitié du 19ème siècle)
.
Terre de pionniers et d'aventuriers, la Sibérie est véritablement, pour la Moscovie, ce que l'Amérique est pour
l'Angleterre (A lire : "La Russie et la tentation de l'Orient" par Lorraine de Meaux, Fayard 2010, "Histoire de la Russie d'Amérique et de l'Alaska", par Michel Poniatowski, 1978, Librairie
Académique Perrin, et aussi (livre pour les plus jeunes), "Le Cosaque au Tigre", nouvelle de Guth Joly, écrivaine et illustratrice à Montpellier, Editions Belin 2008, Collection
"Terres Insolites").
L'AVENTURE, C'EST LA LIBERTE OU LA
MORT.
En 1989, devant le Congrès des députés du peuple de l'URSS, l'écrivain sibérien Valentin Raspoutine, auteur
(notamment), dans les années 60, de "l'Adieu à l'Île", dans lequel il décrit la destruction d'une communauté par l'édification d'un barrage sur l'Angara, fit scandale en déclamant
:
"Faire au Sibérien le reproche
D'avoir un couteau dans sa
poche?
Le Russe est un chat de
gouttière,
Le Sibérien, une panthère."
Il y a quelques semaines, le magazine moscovite Kommersant publiait, sous la signature d'Olessia Guerassimenko, un
article nourri et circonstancié sur les revendications autonomistes des sibériens. Il en fut traduit de larges extraits, très édifiants, dans le Courrier International 1126 paru le 31 mai dernier
(pages 18 à 20) sous le titre : "Marre d'engraisser Moscou" : la Sibérie réclame l'autodétermination. La coloration générale est fort différente de celle de l'opposition
urbaine de Russie occidentale, moscovite et petersbourgeoise en particulier. La manière d'être et de penser évoque plus la tradition libertarienne américaine. Il est dit notamment que "La
Horde nous prenait 10%, Poutine nous prend 70%"...
Il ya une très forte intrication entre défense de l'environnement et
dimensions socio - politiques. La défense victorieuse de la vallée de la rivière Bikin l'an dernier, celle de la Chilka cette année, ont été les premiers et principaux catalyseurs de la
contestation sociale et territoriale (voir les manifestations "Live Taïga" du 5 Juin au 20 Août 2012 puis en 2013, sur le site du WWF Russia - publication du 6 Juin 2012
-).
Si le Russe est un chat, le Sibérien est une panthère. Si le premier est un ours, le second est un tigre
des neiges, qui met assez fréquemment le premier à son menu. Et qu'il chasse avec un talent consommé, attendant son heure, allant jusqu'à rendre les indices olfactifs ou matériels de sa présence
indifférents "non repulsive" pour sa proie, laquelle va jusqu'à partager son antre (comme l'ont montré Yudakov et Nikolaev en
2004).
Il existe même des ours parasites "satellite bears" qui suivent méthodiquement le tigre pour profiter de ses
restes... (Voir Dale Miquelle et ses collaborateurs dans "International Bear News").
"REGNUM ARCTORUM" n'est peut être qu'une formule "satellite", derrière laquelle se
dissimule un élusif mais bien réel TIGRISTAN européen.
UNE FORET SI EUROPEENNE...
Parc National Zov Tigra, Primorye, extrême - orient
russe
Du côté chinois de la frontière, dans la ville de Hulin ("La forêt du tigre"), a été bâtie sur les rives du fleuve Oussouri la statue de tigre la plus gigantesque au
Monde.
Pour le visuel, voir le bandeau déroulant sur la page d'accueil du site du Gouvernement de Hulin :
http://www.hljhulin.gov.cn/