Le retour du tigre en Europe: le blog d'Alain Sennepin

REGARDE MOI.

Dans l'Etat indien du Madhya Pradesh, trois habitants du village de Palkoha (situé, au sein de la réserve à tigres de Panna, sur un îlot de la rivière Ken, et uniquement accessible par bâteau), âgés respectivement de 60, 46 et 36 ans, viennent d'être arrêtés. Ils sont suspectés d'avoir tué un tigre, de l'avoir décapité, d'avoir abîmé sa tête volontairement pour lui donner une apparence particulièrement terrifiante, et utiliser celle-ci comme épouvantail pour le bétail féralisé (= retourné à l'état sauvage) qui met en péril leurs récoltes...  Les gardiens de la réserve ayant découvert la carcasse acéphale se sont lancés à la recherche de "la partie manquante". Les villageois ont alors préféré, par précaution, jeter celles-ci dans les profondeurs boueuses de la rivière. Mais celle-ci a fini par être retrouvée par des chiens à l'odorat particulièrement développé, qui travaillent avec les gardiens... Voir pour le détail l'article de P. Naveen (TNN), publié ce jour dans "The Times of India" :

https://timesofindia.indiatimes.com/city/bhopal/madhya-pradesh-freaky-motives-led-to-beheading-of-tiger-carcass-in-panna-3-held/articleshow/78439406.cms

Dans l'Etat du Maharashtra (Inde du centre-ouest), le corps d'une léoparde enceinte a été découvert hier. L'animal a été manifestement agressé par un grand félin, probablement un gros tigre, dans un conflit de territorialité. Elle portait trois foetus, deux mâles et une femelle. L'un des mâles était noir (mélanique). Voir le détail dans l'article de Mazhar Ali, publié ce jour par "The Times of India" :

 https://timesofindia.indiatimes.com/city/nagpur/pregnant-leopard-dies-in-territorial-fight/articleshow/78373028.cms  

Plusieurs candidats vaccins pour la COVID-19 prévoient d'intégrer dans leur préparation du squalène*, qui est une huile naturelle produite par le foie des requins. C'est notamment le cas de celui de la compagnie pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline, qui utilise déjà régulièrement ce produit dans la composition de vaccins contre la grippe. Jusqu'à 500 000 squales pourraient être tués dans ce but, selon certains experts, qui viendraient s'ajouter aux 3  millions d'ores et déjà prélevés chaque année pour cette huile précieuse... Industrie requinière...

Un Grand Requin Blanc. Il n'en resterait que quelques milliers dans l'Océan Mondial.

Le squalène est en effet utilisé comme adjuvant dans les préparations médicales. Il est censé renforcer l'efficacité d'un vaccin en créant une réponse immunitaire plus puissante... D'autres équipes scientifiques travaillent, pour leur part, à l'élaboration d' une alternative synthétique au squalène, à partir d'extraits de canne à sucre fermentée. Voir pour le détail l'article d'Aisha Zahid, publié ce jour par "Sky News"...

https://news.sky.com/story/coronavirus-half-a-million-sharks-could-be-killed-for-vaccine-experts-warn-12083167

... Et celui de Dylan Donnelli publié par "The Express", ce jour :

https://www.express.co.uk/news/science/1340719/shark-news-coronavirus-vaccine-wildlife-expert-squalene-development-cases-second-wave

* Il est présent en grande quantité dans l'huile du foie des requins d'où son nom, et en moindre quantité (0,1 à 0,7 %) dans l'huile d'olive et dans d'autres huiles céréalières ou provenant de l'amarante, des semences, du son de riz, de germes de blé… Le squalène commercialisé est principalement extrait de foies de requins. Il est utilisé dans des produits de beauté, comme cosmétique et dans certains vaccins.

Last but not least, il y a 3 jours, le super chalutier "Scombrus" a été inauguré à Concarneau, sous protection policière, malgré les protestations des artisans pêcheurs et des écologistes...

https://www.seashepherd.fr/index.php/actu-editos/actualites/223-news-02092020-fr-01

https://reporterre.net/La-France-lance-un-chalutier-geant-fossoyeur-des-mers

Mala tempora currunt, sed peiora parantur ("Les temps mauvais sont en marche, et en annoncent de pires").

Cet article a été actualisé au 1er octobre (voir en bas de page).

Le jaguar géant des marais (Panthera onca palustris) est l'équivalent américain du tigre eurosibérien. Depuis cet été, au Brésil, des incendies volontaires, allumés par des pyromanes à la solde de grands latifundiaires, ont détruit en un mois 25000km2 du Pantanal, qui est la plus grande zone humide de la planète (150 000km2), entraînant la mort de milliers d'animaux, dont des caimans, anacondas, capybaras, et  jaguars géants (parmi beaucoup d'autres). Le magazine brésilien ISTOE a traité le sujet dans son édition du 18 septembre.

La destruction du marais et de son espèce clef-de-voute équivaut à l'extirpation du tigre eurosibérien dans les roselières d'Asie centrale au siècle dernier.

Un jaguar géant palustre sur les rives de la rivière des trois frères (Pantanal).

Le comportement actuel du Brésil avec ses grands félins équivaudrait, en Russie, à l'extermination des tigres de l'Amour...

Le jaguar palustre "ne partira pas sans faire de vague". Il y aura encore de nombreux morts, et pas toujours du même côté. La réaction des tigres du Hunan (Chine centrale) à leur agression systématique par les paysans, sur décision politique,  entre 1948 et 1963, peut donner une idée de ce qui peut se produire : La destruction des sangliers et des taureaux sauvages de montagne dans le Hunan (Chine centrale) au cours des années 1950 entraîne une véritable confrontation guerrière avec les tigres. Ces derniers subissent de plein fouet la destruction de leurs territoires et de leurs proies, en particulier les sangliers qui sont tués par dizaines de milliers, mais aussi les taureaux de montagne, les uns et les autres devenant, aux yeux des agriculteurs, des parasites de leurs terres en expansion... Dès la fin des années 1940, des équipes de chasse au tigre, considéré comme un « bandit à quatre pattes », avaient été constituées. Au cours des années 50 et 60, les exploits de certains de leurs membres seront glorifiés. En 1952, les tigres affamés tuent et dévorent 121 personnes, dont 32 en une seule journée. Ceci amène, en novembre de la même année, une conférence d'une ampleur sans précédent, à Fuyang, qui décide l'extermination systématique des tigres de la Province, évoquant singulièrement la réunion de la « Seamen's Bethel » à New Bedford en 1841... Le conflit perdure officiellement jusqu'en 1963, les déprédations des tigres étant particulièrement spectaculaires dans le village de Baihuwei en 1957. Les gens, horrifiés, constataient que les tigres étaient devenus complètement fous furieux et ivres de haine. Au total, ils auront semé la terreur dans une centaine de villages et une ville (Changcha). Le bilan officiel des morts victimes de ces onze ans de guerre est de 817 tigres, près de 2000 villageois, et des dizaines de milliers de chiens, cochons, vaches, chevaux...

Luis Sepulveda avait évoqué un phénomène analogue concernant une seule femelle, d'une espèce bien plus petite que le jaguar, en l'occurence l'ocelot, dans son roman "Le vieux qui lisait des romans d'amour"...

Si le Pantanal se situe en grande partie au Brésil, il est aussi présent en Bolivie et au Paraguay.

Plus au Nord, d'autres jaguars aussi colossaux que ceux du Pantanal parcourent la vaste plaine herbeuse du bassin de l'Orénoque, à cheval entre Colombie et Vénézuela, les Llanos :

Une partie des Llanos évoque un "Pantanal miniature". Ce milieu marécageux est constitué de "Surales", monticules édifiés par un lombricien de plus de 1,50m de long, sur un espace de 75000km2, englobant une large partie du delta de l'Orenoque (25000km2), situé au Nord-Est du Venezuela.

Zangerlé, Anne; Renard, Delphine; Iriarte, José; Suarez Jimenez, Luz Elena; Adame Montoya, Kisay Lorena; Juilleret, Jérôme; McKey, Doyle (2016). "The Surales, Self-Organized Earth-Mound Landscapes Made by Earthworms in a Seasonal Tropical Wetland". PLOS ONE. 11 (5)

https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0154269

"Mysterious Mounds in South America Are Likely Worm Poop"

https://www.nationalgeographic.com/news/2016/05/160512-earthworms-south-america-animals-mystery-mounds/

Doyle McKey, « Paysages bioculturels et biomimétisme à un niveau écosystémique », dans Des êtres vivants et des artefacts, 20 janvier 2016

https://journals.openedition.org/actesbranly/667

Actualisation au 1er octobre.

Le nombre de feux de forêt a augmenté de 61% en septembre par rapport au même mois de l'année dernière en Amazonie brésilienne, et a presque triplé au Pantanal, où tous les records ont été battus, selon les chiffres officiels rendus publics jeudi 1er octobre.

Les satellites de l'Institut National de Recherches Spatiales (INPE) ont identifié 32.017 foyers d'incendie le mois dernier en Amazonie, contre 19.925 en septembre 2019. C'est le pire mois de septembre depuis 2017. Plus au sud, au Pantanal, les incendies ont battu tous les records: avec 8.106 foyers, septembre 2020 est de très loin le pire mois depuis que ces statistiques ont commencé à être dressées par l'INPE, en 1998.

Le Président brésilien, Jair Bolsonaro a alors accusé «certaines ONG» d'être à l'origine de «crimes environnementaux» pour faire de la mauvaise publicité au Brésil. La semaine dernière, lors de son discours à l'Assemblée générale de l'ONU, il avait déjà affirmé que les incendies en Amazonie étaient provoqués par des indigènes qui employaient des techniques traditionnelles de brûlis itinérants... Détail dans "Le Figaro" du 1er octobre :

https://www.lefigaro.fr/international/bresil-l-amazonie-et-le-pantanal-toujours-ravages-par-les-incendies-20201001​​​​​​​ 

Ceci fait suite à "Le Miroir. La Baleine - Rhytine en reconquête" mis en ligne le 10 novembre 2015.

http://europe-tigre.over-blog.com/2015/11/le-miroir.html

A Sakhaline, la population de baleines grises du Nord-Ouest fut considérée comme éteinte dans la deuxième moitié des années 1960, exterminée par l'industrie baleinière. Mais, au début des années 1990, des petits noyaux familiaux  furent redécouverts au large de Sakhaline, l'ensemble étant alors estimé à quelques dizaines d'individus.* En 2004, cette communauté cétacéenne était évaluée à 115 individus.  Des accords furent passés entre les organisations de protection des grands mammifères sauvages et l'industrie pétrolière et gazière. Voir le document  sur le sujet (publication complète, finalisée et actualisée en 2012, 107 pages) : Gray Whales. The Sakhalin Story (en russe et en anglais).

http://www.sakhalinenergy.ru/media/library/ru/publications/Gray_whales_book_web.pdf

En 2016, on en comptait officiellement 174, et en 2018, 240 sans intégrer les baleineaux au comptage. Aujourd'hui, on compte 297 baleines. Un robuste système de crèche est à l'oeuvre pour les baleineaux. Une vidéo montre une vieille nounou, énorme et blanche, qui s'occupe de 4 petits pendant que les mères se nourrissent...

https://tvkultura.ru/video/show/brand_id/61314/episode_id/1453619/video_id/1565768/ 

* Apparemment, personne ne s'est jamais posé la question du "parcours" des survivants, et du "comment" de leur improbable succès à l'abri des regards prédateurs, pendant des décennies...